Sur le plateau de Lorette (août 1917)

I

Quand au bout de huit jours, le repos terminé,

Nous allons reprendre la tranchée ;

Notre place si terrible où, sans nous,

On prend la pile.

Mais c’est fini, l’on en a assez !

Et personne ne veut plus marcher.

Le cœur bien gros, c’est dans un sanglot

Que l’on dit adieu aux civelots.

Même sans tambour, même sans trompette,

L’on s’en va là-haut en baissant la tête.



Refrain

Adieu la vie, adieu l’amour,

Adieu toutes les femmes ;

C’est pas fini, c’est pour toujours,

De cette guerre infâme.

C’est à Lorette, sur ce plateau,

Que nous laisserons notre peau.

Car nous sommes les condamnés,

Nous sommes les sacrifiés.



II

Nous voilà partis avec le sac au dos,

L’on peut dire adieu au repos ;

Car, pour nous, la vie est dure,

C’est terrible, je vous l’assure.

A Lorette là-haut, l’on va nous descendre

Sans même pouvoir nous défendre ;

Car si nous avons de très bons canons,

Les Boches répondent à leur son.

Forcés de nous terrer dans la tranchée,

Attendant l’obus qui vient nous tuer.



Refrain

Adieu la vie, adieu l’amour, etc.



III

Huit jours de tranchées, huit jours de souffrances.

L’on a quand même l’espérance,

Car peut-être ce soir la relève

Que nous attendons sans trêve.

Soudain, dans la nuit, avec le silence,

L’on voit une troupe qui s’avance.

C’est un bataillon de chasseurs à pied

Qui vient pour nous remplacer.

Doucement, dans l’ombre, sous la pluie qui tombe,

Les petits chasseurs viennent chercher leur tombe.

Refrain

Adieu la vie, adieu l’amour, etc.



IV

C’est bien malheureux de voir, sur le boulevard,

Faisant la foire, ces tas de rossards

Si pour eux la vie est rose,

Pour nous ce n’est pas la même chose.

Au lieu de se cacher, tous ces embusqués,

Ils feraient mieux de monter aux tranchées

Pour défendre leurs biens, car nous n’avons rien,

Nous autres purotins

Tous nos camarades sont étendus là,

Pour défendre le bien de ces richards-là.



Dernier refrain

Ceux qu’ont le pognon

Ceux-là reviendront.

Car c’est pour eux qu’on se crève,

Mais c’est la fin, car les biffins vont tous se mettre en grève

C’est à votre tour,

Messieurs les gros,

De monter sur le plateau,

Puisque vous voulez la guerre,

Payez-la de votre peau.

Chanson réaliste (copiée le 20. 8. 17)

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