Chanson patriotique des poilus défenseurs de Verdun (20 février 1917)


Chanson à quatre couplets et deux refrains qui a été copiée le 20 février 1917 par un soldat anonyme du 95e régiment d’infanterie en cantonnement en Argonne avant d’être interceptée par le contrôle postal de la 4e armée.


Source :

Lettre conservée dans les archives du contrôle postal au Service historique de la défense (16N1405). L’expéditeur est inconnu. On peut supposer que le texte de la chanson a été envoyé sans lettre d’accompagnement (voir Craonne-17-07-10). Le titre qui annonce une « chanson patriotique » pouvait être destiné à ne pas éveiller l’attention de la censure. Dès lors que la chanson a été interceptée, il prend presque une dimension ironique.

Il s’agit d’une transcription faite par le contrôle postal qui a vraisemblablement modifié l’orthographe et la ponctuation du manuscrit original (voir Champagne-17-02-15). On peut donc s’interroger sur les passages soulignés de même que sur l’emploi des majuscules (par exemple Officier de Chasseurs au 3e couplet, ou Grands Boulevards au 4e). Qu’en était-il dans le manuscrit ?


Contexte :

Le Journal de marche et des opérations du 95e régiment d’infanterie (SHD à Vincennes : 26N670/7) permet de connaître précisément sa position le 20 février 1917. Après avoir combattu quatre mois dans la Somme, le régiment vient d’être transféré sur le front d’Argonne. Ayant débarqué en gare de Sainte-Menehould le 19 janvier 1917, il gagne le sous-secteur du Four de Paris avec, à tour de rôle, deux bataillons en première ligne et le troisième en soutien. Ainsi dans la nuit du 17 au 18 février, le 1er bataillon est relevé par le 3e et va cantonner du 18 au 26 février dans les baraquements de la Croix Gentin (à 12 km de Sainte-Menehould, commune de Vienne la Ville). La lettre étant datée du 20 février, on peut logiquement penser que l’expéditeur de la chanson appartient au 1er bataillon.

En dépit de ce qu’annonce le titre « Chanson patriotique créée par les poilus défenseurs de Verdun », le refrain et le second couplet ne font pas allusion à Verdun, mais à un autre lieu, Les Eparges, entre Verdun et Saint-Mihiel. Verdun et Les Eparges, deux lieux qui apparaissent dans le JMO 95e régiment d’infanterie au cours de l’année 1916. Le régiment a participé à la bataille de Verdun en février-mars. Il a été ensuite aux Eparges du 18 mars au 17 septembre, avec un bref retour à Verdun en juillet. Dans l’Historique du 95e R.I. publié après la guerre (Librairie Chapelot - sans date), on peut lire : « Les Eparges sont un secteur extrêmement dur. On patauge jusqu’à mi-jambe dans la boue argileuse qui happe et qui déchausse. Toutes les semaines, une explosion de mines occasionne de terribles pertes. »


Remarques sur les paroles :

Outre « c’est pas fini » au premier refrain et le « c’est pour eux qu’on s’crève » au second refrain, des variantes qu’on retrouve dans d’autres versions datant de la période 1917-1919, il faut noter des variantes inhabituelles comme « car sans nous, on n’est pas tranquille » (premier couplet), « dans cette guerre infâme » (premier refrain), « et pourtant dans l’espérance » (3e couplet), et surtout au quatrième couplet : « des tas d’gens qui font la foire » « le bien de ces gros gars-là » ainsi qu’au dernier refrain : « puisque vous aimez tant la guerre ».


Musique :

Aucune indication de l’air sur lequel se chantent les paroles.

Autour de la Chanson de Craonne   http://www.chansondecraonne.fr  M-à-j le 15/01/2017