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Source :
Annales historiques compiégnoises, n°27, septembre 1984, « Pages de la guerre 14-18 en Picardie », p. 22.
En 1984, Marthe Caillaud (1921-2001) a publié une partie des souvenirs écrits une vingtaine d’années plus tôt par son père Léon Bernard, ancien combattant de la Grande Guerre. L’extrait concernant la « chanson de Laffaux » commence ainsi : « Tous les soirs nous mangeons, non pas à la gamelle, mais dans la petite buvette de Mme Guillou. On joue aux cartes, au billard. Quand Simian est là avec son violon nous chantons (moi surtout) : Tout le long de la Tamise1, Ferme tes jolis yeux2, Reviens vers le bonheur3, etc… et aussi ce qui nous rappelle de bien tristes jours passés : « Adieu la vie… »
Contexte :
Né le 16 août 1894 à Ourscamps (Oise), Léon Bernard a été incorporé d’abord au 2e régiment de cuirassiers, puis à partir du printemps 1916 au 4e régiment de cuirassiers où il est mitrailleur. Le 6 mai 1917, lors des combats de Laffaux, Léon Bernard est blessé au bras et évacué. Après avoir été soigné dans l’Orne à l’hôpital 5/51 de Bagnoles de l’Orne, puis à Tinchebray, il est déclaré inapte pour six mois et « exempté de porter le sac d’infanterie ». Il rejoint donc à partir de septembre 1917 le dépôt du régiment qui se trouve à Thouars (Deux-Sèvres) où il est affecté à des tâches administratives.
C’est donc loin du front que Léon Bernard chante cette « chanson de Laffaux ». Les autres chansons qu’il cite n’ont rien de subversif. Le répertoire de Léon Bernard en 1917 correspond tout à fait à celui des cahiers de chansons où l’on trouve la Chanson de Craonne (ou d’ailleurs) au milieu de romances sentimentales et de chansons comiques ou réalistes.
Remarques sur les paroles :
On connaît d’autres refrains ou extraits de refrains publiés par des anciens combattants, ainsi par exemple Georges Bonnamy du 131e régiment d’infanterie dans La Saignée (1920) : « C’est à Craonne, c’est sur le plateau/Qu’on doit laisser sa peau…/C’est nous les sacrifiés ». Ici la localisation à Laffaux renvoie directement à l’expérience personnelle du soldat Léon Bernard. Elle témoigne aussi de l’extraordinaire plasticité de la chanson et de son premier refrain. Rien qu’en restant dans le secteur du Chemin des Dames, on peut imaginer d’autres chansons avec au refrain, d’autres toponymes en deux syllabes, comme Cerny, Soupir…, où les combats n’ont pas été moins durs qu’à Craonne ou à Laffaux.
Musique :
Aucune indication de l’air sur lequel se chantent les paroles du refrain.
1 Chanson créée en 1916 (Paroles : Armand Foucher et Eugène Joullot - musique : Eugène Rosi).
2 Chanson créée en 1913 (Paroles : Virgile Thomas et René de Buxeuil - musique : René de Buxeuil).
3 Mélodie-valse créée en 1917 (Paroles : Willems - musique : Eugène Gavel).
Autour de la Chanson de Craonne http://www.chansondecraonne.fr M-à-j le 15/01/2017